Kuluna
Catégorie

Le lundi 27 octobre dernier, aux aurores, un père de famille a été abattu de sang-froid, en présence de son épouse et de ses 3 enfants, dans la commune de Mont-Ngafula. Il s’appelait Hugo MOKE, contrôleur financier au service des Soins de Santé Primaire en Milieu Rural (SANRU) à Kenge. Il était revenu dans la capitale pour des raisons d’ordre familial, 2 jours seulement avant son assassinat. Un mort de trop, pour ne pas dire un crime de trop. En même temps, c’est devenu un non-évènement pour les kinois en général, et les habitants de Mont-Ngafula en particulier, qui vivent la peur au ventre, en se demandant: « à qui serait le prochain tour » ?

En effet, depuis quelques années, les habitants de la ville/province de Kinshasa sont habitués aux crépitements des balles et aux agressions à l’arme blanche, devenues monnaie courante.              Il ne se passe plus une journée, sans que les kinois ne déplorent des actes de barbarie, qui se terminent souvent en bain de sang, dans la plupart des cas. Les agresseurs s’acharnent sur leurs victimes, jusqu’à ce que morts’en suive.

Kuluna

Celles qui parviennent à s’en sortir, gardent parfois des séquelles à vie. Il y a une quinzaine d’années, c’étaient essentiellement des affrontements entre bandes rivales, des communes voisines, ou des quartiers proches.

Le mode opératoire semble évoluer au fil du temps, quand bien même les antagonismes entre gangs, demeurent à la base des heurts violents, auxquels la population assiste, médusée. D’autres cibles sont désignées en fonction d’éléments de richesse visibles ou non. Les Kuluna agissent aussi sur « commande », moyennant rémunération. L’intention étant de tomber à bras raccourci sur un individu, une famille ou un groupe de personnes, en vue de lui soutirer de l’argent, des objets de valeur ou pour un règlement de compte, avec comme objectif: faire très mal. Ces scènes sordides ont des fortes probabilités d’être filmées et balancées sur les réseaux sociaux.

Kuluna

L’insécurité a fini par gagner toutes les communes, qui y font désormais face, de jour comme de nuit. La commune de la Gombe, siège des institutions n’est pas non plus épargnée. Les sorties nocturnes deviennent périlleuses. Cette situation ne semble émouvoir personne, en haut lieu.

Aucune mesure concrète n’a été prise jusque-là, pour sécuriser les personnes et leurs biens. La prétendue opération « Ndobo » n’a pas encore produit l’effet escompté. Depuis l’annonce avec pompe, il y a quelques mois, jusqu’à présent, les Kinois sont livrés à eux-mêmes. Les Kuluna continuent à sévir, comme en territoire conquis.

Kuluna

 Il semble que malgré cette absence de résultats, les autorités se projetteraient déjà sur autre chose, qu’elles auraient dénommaient opération :« Kanga-Kanga ». Ceux qui vivent cette situation dans leur chair, attendent-ils des noms d’opérations ou la sécurité ? Tout porte à croire, que les gouvernants sont très éloignés des réalités de la population. Le fossé va continuer à s’élargir davantage.

KINSHASA FAIT PEUR !

L’intention n’est pas de créer une psychose, mais d’attirer l’attention des décideurs sur cette insécurité, qui fait des victimes chaque jour. Il y a bien péril en la demeure. Les Kinois vivent dans une angoisse permanente. Beaucoup de quartiers sont devenus peu à peu, des zones de non-droit, où l’autorité de l’Etat n’existe plus. Même les agents de l’ordre redoutent ces malfaiteurs, qui opèrent aussi en plein jour, à pied, à moto ou en voiture. 

Certains sont mieux équipés que la police nationale. Les armes blanches ne suffisent plus. Difficile de dénombrer les braquages au quotidien, dans nos différentes communes, qui font de nombreuses victimes. 

Le ministère de l’Intérieur et l’Hôtel de ville de Kinshasa ont l’air dépassé par la situation. Ils ne communiquent guère sur le sujet, probablement parce qu’ils manquent d’outils pour répertorier et relayer les informations en temps réel, sur tout ce qu’il se déroule dans les communes. 

Quant aux kuluna incarcérés, ils ne restent sous main de justice que l’espace d’un matin. Dans les quartiers, la police y va aussi à reculons, craignant d’éventuelles représailles. 

Généralement, quand ces hors-la-loi reprennent du « service », ils se montrent encore plus virulents, qu’avant. L’absence de sanction sévère, les conforte dans une forme de « toute puissance ». Car les réponses apportées jusque-là, ne semblent plus adaptées. Ils partent à Kanyama-Kasese, après avoir ôté la vie à plusieurs personnes et endeuillé de nombreuses familles. Et ils en reviennent avec un large sourire, comme si de rien n’était. Pendant ce temps, la vie des proches, des victimes de leurs actes, ne sera plus jamais la même.

Kuluna

LA PRISE EN CHARGE DES VICTIMES INEXISTANTE À KINSHASA 

Le phénomène Kuluna a fait de nombreuses victimes à Kinshasa, et même dans certaines provinces proches de la capitale, notamment au Kongo Central. En cas d’agression, les familles sont obligées de faire face aux frais d’obsèques, sans aucune aide des pouvoirs publics. Certains corps sans vie à la morgue, mettent du temps à être enterrés, faute de moyens. 

Les victimes qui survivent, sont obligées de se prendre aussi en charge, elles-mêmes. Il n’existe aucun suivi médical ou un accompagnement psychologique de l’Etat. Celles qui sont appelés à vivre avec handicap, vont dépendre de leurs proches, pour le reste de leur vie. Les pouvoirs publics quand ils le peuvent, se contentent de dénoncer, avec la « dernière énergie », pour reprendre le terme consacré. Pourtant, ce n’est pas ce que les kinois attendent de ceux qui les gouvernent. Cette absence de fermeté de l’Etat, contraint certains à prendre des dispositions, en vue de se défendre eux-mêmes. Il est important, qu’il y ait une vraie réflexion autour des victimes de ces actes des barbaries, qui sont aussi victimes de l’impuissance de nos gouvernants.

OÙ SERAIENT PASSÉS LES POUVOIRS PUBLICS ?

Sur l’épineuse question du banditisme dans la ville de Kinshasa, le gouvernement et l’Hôtel de ville de Kinshasa, semblent être à court d’idée. Les gouvernements se succèdent, sans la moindre réponse appropriée. 

C’est à se demander, si la clameur publique n’atteint pas nos gouvernants, qui sont pourtant abonnés aux réseaux sociaux. Leur silence sur le sujet devient assourdissant, et laisse libre cours à la spéculation.

Apparemment, l’accent n’est mis que sur la recherche des potentiels investisseurs. Pour cela, les membres du gouvernement rivalisent d’ingéniosité. Quand les uns vont jusqu’en Somalie pour en chercher ; les autres vont aux Etats-Unis et en Europe, pour inciter des vieux sportifs à la retraite, à visiter le Congo, moyennant espèces « sonnantes et trébuchantes » ! Les clubs de football réputés sont contactés, pour contribuer à la promotion de l’image de marque du pays, comme le font certains voisins ! Des fortes sommes seraient mises en jeu. 

Kuluna

Des chambres de commerce sont également créées à tour des bras, avec une importante mobilisation de la presse locale, en insistant pour que le reportage passe à une heure de grande écoute. Tout ceci pour être bien vu, en haut lieu.

Mais quel est cet investisseur sérieux, qui viendrait installer son activité dans un pays peu sûr ? Comment le gouvernement entend-il assurer la sécurité de ces investissements, ou pour ces touristes, alors qu’il n’y arrive pas pour les Congolais ? Existeraient-ils des mesures particulières pour la sécurité des étrangers et de leurs investissements ?  

Quand les Kinois partent de chez eux le matin, ils n’ont pas la certitude de retrouver les leurs en fin de journée. Cependant, les potentiels touristes ou investisseurs auraient la garantie d’une sécurité ! 

Le moment est donc venu, pour que les questions liées à la sécurité intègrent l’agenda des priorités du gouvernement et l’Hôtel de ville de Kinshasa, qui ne semblent pas en mesurer l’importance.

Les comparaisons avec d’autres mégalopoles, où règnent l’insécurité seraient indécentes. Ce serait une manière de se donner bonne conscience et ne pas réfléchir, sur des réponses concrètes à apporter aux problèmes d’insécurité. Voir les choses sous cet angle, s’apparenterait à un aveu d’impuissance, ou mieux, d’incompétence. 

Les solutions à apporter aux problèmes d’insécurité à Kinshasa, doivent provenir des Congolais eux-mêmes. Il y a besoin de plus de fermeté, avant d’évoquer une quelconque réinsertion sociale. Les sanctions devraient être plus dissuasives, de manière à éviter de faire des émules ou tout simplement la récidive.

Rappelons que la semaine dernière, un coach d’une équipe féminine congolaise a également été abattu devant son domicile, toujours dans la commune de Mont Ngafula, à Kinshasa.

                                                                                              Clément KAMULETA